Emily and OuiJa : 04

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‘Bon, Draesmael, on fait ça comment alors ?
– Je n’en ai aucune idée. AbracadabraTsoinTsoin ?
– Euh, ça existe même pas ton sortilège.
– Tu sais bien ce qu’elle dit, l’important ce ne sont pas les mots, mais le pouvoir que l’on met dedans.
– Ouais, enfin elle, elle le fait, ça c’est sûr. Moi j’ai jamais réussi à faire fonctionner quoiqu’ce soit comme ça!
– Et bien, c’est le moment ou jamais de tenter, non ?
– Si ça m’explose dans la tête, j’te promets de venir te hanter jusqu’à la fin d’tes jours en chantant la chanson du Hérisson. Et à mon avis j’serai pas jolie-jolie.
– Déjà que…
– Hein ?
– Non, rien. Tu préfères qu’on l’attende ?
– Tant qu’à faire, hein…
– Mais on va l’attendre combien de temps ?
– Bah, j’sais pas moi.
– Tu ne sais pas ? Tu n’étais pas censée lui avoir demandé?
– J’lui ai demandé si elle comptait v’nir.
– Et ?
– Et elle a dit qu’elle était occupée.
– Et ?
– Et bah c’est tout.
– CE MATIN TU M’AS DIT QU’ELLE SERAIT LÀ APRÈS SON EMPRUNT !
– Bah oui. J’imagine.
– … Elle ne reste jamais plus de quelques jours dans un autre corps, si ?
– Bah non…’
Draesmael ramasse quelques brins d’herbe, les renifle, puis les embrase d’un regard avant d’en émietter les cendres en cercle sur le sol.
‘Mais bon, j’sais pas non plus quand elle a commencé en fait…’
Dans un soupir, Draesmael lève les yeux au ciel, les plisse, puis attrape du bout des doigts un bout de bois rangé dans sa ceinture.
‘De toute façon, on ne va pas avoir le temps de l’attendre. Les voilà !
– T’utilises toujours une baguette magique depuis l’temps ?
– De là d’où je viens, une sorcière se sert forcément d’une baguette. Ça fait partie du folklore.
– P’tet, mais Mémé elle aime pas l’Fol-Chlore. Elle est pas très chimie.
– Quoi ? Ouais, non, laisse tomber.
– Bah j’tiens rien.
– Non, mais oublie. C’est une expression de là d’où j’viens.
– Et l’chat noir aussi c’est du Fol-Chlore d’chez toi ?
– Oui. D’ailleurs je me demande où est passé Chat-Par-D’Heure…
– C’est un planqué ton chat, tu l’sais.
– Oui, voilà, ça doit être ça. J’espère juste qu’elle n’a pas emprunté une souris et qu’il n’est pas en train de la chasser dans la campagne.
– T’inquiète, ça craint rien ça.
– Pourquoi ?
– Ca craint rien, c’est tout.
– Bon, on s’y met ? Ils sont juste treize et ils attendent gentiment pendant qu’on bavarde.
– Bah, y’vont ptet bien vouloir attendre encore un peu, non ?
– Oui, non, j’crois pas. Ils m’ont l’air bien prêts.
– Qui n’tente rien… Draesmael ?
– Oui ?
– Juste au cas où, sache que j’ai été très heureuse de t’rencontrer.
– Moi aussi, Nounou, moi aussi…

*

Esméralda gardait son regard fixé dans celui de l’animal. Qui le lui rendait bien.
Après avoir pu emprunter son corps pendant qu’il dormait, elle en avait conclu que l’animal était somme toute différent de ceux auxquels elle s’était frottée avant.
Eux avaient été faciles d’accès.
Et surtout seuls à l’intérieur.
‘À un moment, faudra qu’on discute tous les deux… Enfin tous ensemble quoi.
– Miaule.
– Ouais, c’est ça, prends-moi pour une bille aussi, j’te dirai rien.
– Miaule.
– Bla bla bla. M’est avis qu’tu seras pas l’dernier à tenter d’me flouer. Mais certainement pas l’premier à y’arriver non plus. Pour l’moment on va faire genre y’a aucun problème entre nous, parce qu’il y a plus important à faire, là, tout d’suite. Mais n’espère pas y’échapper.
– Ronronne, ronronne.
– Tu perdras l’usage d’ta gorge avant d’arriver à m’avoir par les sentiments. Economise tes ronrons.
– Crache.
– Ha ben tu vois qu’on s’comprend finalement. Si t’as fini d’parler pour rien dire, on va p’tet pouvoir y’aller ? Doivent déjà avoir les oreilles qui chauffent.
– Grogne.
– Là j’suis totalement d’accord. Mais bon si vous aviez été un peu plus réceptifs tes copains et toi, on aurait gagné un temps fou.
– Miaule.
– Oui, on aurait aussi gagné un temps fou si j’mettais pas mon nez là où j’devrais pas. Mais j’suis très curieuse. Dommage, z’étiez pas encore au courant. Sinon, j’sais qu’à quatre pattes tu vas forcément plus vite que moi à deux, mais t’iras encore plus vite en montant sur mon balai.
– Crache.
– Comme tu veux. Mais t’arriveras après la bagarre. En même temps, tout l’monde sait déjà qu’t’es un planqué.’
Tandis qu’Esméralda et son balai décollent à toute berzingue, Chat-Par-D’Heure reste assis sur le pas de porte de la chaumière.

‘J’t’en ficherais des planqués. Pff.
Je ne l’ai pas vue venir celle-là.
– Moi non plus. En même temps elle m’a eu par surprise. Elle est vicieuse.
J’imagine qu’elle n’a pas gagné son titre de plus grande sorcière du royaume en faisant de la soupe d’orties hein.
– Non, ça c’est sûr. C’est dans ce genre de cas que je comprends pourquoi la magie a été éradiquée dans notre monde.
Tu es sûr que c’est une histoire de magie là ? Elle est pas juste carrément douée ?
– Franchement, une humaine qui s’amuse à entrer dans le corps d’animaux et à fouiller dedans comme si de rien n’était, je ne trouve pas ça super normal non plus.
J’avoue. Bon, on fait quoi ? On les rejoint, ou on se planque ?
– Très drôle petit maître. On va les rejoindre. On va déjà la devancer, elle, histoire qu’elle comprenne qu’elle n’a pas à faire à n’importe qui.
D’accord.
– Et après on va espérer.
Espérer qu’elles réussissent ?
– Oh, ça j’en suis certain. Surtout avec celle-là.
Espérer quoi alors ?’
Chat-Par-D’Heure se lève, descend du perron, s’étire en baillant, se rassied un instant, la queue battant un rythme effréné sur le sol. Puis il lèche sa patte droite, et se la passe plusieurs fois derrière l’oreille du même coté.
‘Tu fais quoi ?
– Ma toilette.
– Mais genre c’est le moment ?
– Ca me permet d’aiguiser mes perceptions. S’il nous arrive quelque chose, c’est moi qui ressentirai la douleur physique. Donc on fait ça à ma manière.
Ok, si tu veux. Alors, espérer quoi ?
– Qu’elle ne dise rien à Draesmael, par exemple. Ça nous compliquerait un peu la vie.
– J’avoue…’