
Sous ses yeux défilait le texte qu’ils avaient tant cherché. Les vieilles pages de parchemin, pourtant bien conservées, semblaient risquer de s’effriter au moindre contact. Au milieu des vieilleries exposées dans le Bureau du Palais, bijoux et objets de décoration en or massif, le tout disposé dans de massives bibliothèques de bois de chêne, le livre ne payait pas de mine. Mais l’avoir posé sur un piédestal de bois et d’or au beau milieu de la pièce lui donnait une valeur bien particulière.
Alors le ciel brûlera de mille flammes,
Et viendra en nos terres l’Avatar du Sombre.
Il renaîtra par-delà la Mer Parme,
Et en temps étendra son courroux sur le monde. (Genèse : 5)
Un bruissement le fit stopper. Une fois le silence revenu, il reprit sa lecture, feuilletant les pages du grimoire de cuir pour en décoder les récits.
‘Genèse 5, Genèse 5… G, septième lettre de l’alphabet donc, si le code est le bon, cinquième strophe du chapitre 7, en partant de la fin.’
Son index remontait les pages qu’il tournait à rebours, tandis que ses yeux survolaient les paragraphes qu’ils rencontraient.
Ses yeux couleur cendres auront la profondeur du Néant,
Et sa peau la chaleur de l’Autre-Rive.
Il châtiera les coupables, punira les innocents,
Et sa marque à jamais sur nos terres va vivre. (Elégie : 12)
‘Chapitre 5, douzième strophe… Vite…’
Il entendait les pas alarmés des gardes autour de lui. Mais personne ne pouvait encore le trouver.
Mais au jour du renouveau, des bras se lèveront,
Et l’Avatar, ici, verra son temps finir.
Les coups, par leur violence, de douleur l’abattront,
Et son corps, dessus la terre, s’en ira pourrir. (Verset : 3)
‘Ca ne finit donc jamais ?’. Il tourne les pages.
Mais Dame Nature se vengera de cet affront,
Car de la douleur, un Roc Maudit surgira,
Qui, sur le Royaume, étendra son vil poison,
Et fera naître l’Envie dans de nouveaux bras. (Chapitre : 1 – Livre 2)
‘… Livre 2 ? Quel Livre 2 ?’
Un brouhaha de pas de course devant la porte.
‘Quelqu’un a vérifié le Bureau ? Il ne faudrait pas que quelque chose disparaisse de là-bas !
La porte s’ouvre brutalement sur un bureau quasi-vide. La fenêtre, grand-ouverte, crée alors un courant d’air qui fait tourner quelques pages du livre ancien exposé au milieu de la pièce.
‘Allez fermer cette fenêtre. Si jamais ce livre s’abîme par notre faute, nous sommes bons pour finir en nourriture pour loups !’
L’un des soldats s’exécute, ferme la fenêtre et le grimoire.
‘Imbécile, tu crois vraiment qu’un simple courant d’air pourrait soulever une couverture aussi lourde ? Réfléchis un peu et laisse le livre ouvert à la page marquée !’
Le soldat rouvre délicatement le grimoire aux pages où repose un petit ruban de soie rouge.
‘Maintenant sortez ! Et trouvez cet intrus !’
Dehors, accroupi sur un toit non loin de là, une silhouette se dissimule dans les ombres et reprend son souffle.

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